11
Jui
2020

Il n'a forcément rien compris,

il en a désormais la certitude, d’ailleurs le proverbe dit que la vérité sort de la bouche des enfants, un homme, certes bien informé mais également ivre mort, le lui a bien dit d’un ton péremptoire tout autant qu’amusé un début d'après-midi de la semaine dernière : « le virus, il est pas dans l'air sinon on serait tous morts, il sert à rien ton masque ! », celui-ci n'étant pas censé savoir que l'occasion de porter cet attribut de tissus minimisait aussi chez l’homme, bien que toujours partant pour un p’tit carnaval des familles, l’impact des violentes allergies qu’il doit régulièrement aux fourbes platanes qui poussent par légion dans le coin et avec l’appui des inattaquables esthètes de la plus ancienne ville de l’univers, tout le monde ne possède en fait qu'une partie de sa vérité, CQFD.

Il n'a forcément rien compris mais quand bien même, pour donner l'exemple (?) au moment de partir pour l'école, l'homme porte le masque que l'enfant ne met plus car, tout simplement, l'homme, quand il arrive devant cette école, se trouve être le SEUL à porter un masque, on pourrait même ajouter qu'il est le seul à ne pas fumer, à ne pas cracher des coquilles de graines de tournesol parterre ou à parler à deux centimètres des autres gens l'environnant. Mais revenons à nos postillons, il est seul, donne sûrement l'impression de ne pas vouloir se mélanger mais il est seulement d'humeur sombre et ceux qui le connaissent savent qu'il n'est simplement pas de nature liante, il n’est pas pour autant cette personne désagréable qu’un visage masqué aux sourcils froncés pourrait montrer aux imbéciles qui s'arrêtent aux premiers détails. Sinon, de toute façon, il s’en fout.

Il n'a sûrement rien compris, ça y est tu le sais toi aussi, car le maître guilleret qui vient ouvrir le portail du temple de l’apprentissage ne porte lui non plus aucun masque, de toute façon les seuls masques que nous croisons dans la rue sont soit sur des visages de personnes âgées, soit jetés au sol par des idiots qui, passé le temps de confinement, se précipitent tous les quatre matins dans des supermarchés où l’on leur fait laver - sinon ils ne le feraient pas, c’est bien connu - leurs mains avec du gel (qui, on le parie, n'a pas fini de faire parler de lui) et porter un masque puisque quelqu'un, à un moment, on ne sait plus très bien qui, ni où, ni pourquoi, a contraint les enseignes de faire ainsi parce que ben sinon ils n’auraient plus le droit de vendre des trucs fabriqués très loin et à durée d’intérêt et de vie pour le moins éphémères.

Il n'a sûrement rien compris, le monde entier se marre sous une douche de tickets de caisse, mais alors pourquoi ses copains qui tiennent des salles de concert, qui travaillent à la MJC ou qui font par exemple les marchés aux puces, se retrouvent-ils du jour au lendemain agrafés à des contraintes telles qu’ils ne peuvent plus travailler ou presque plus, quitte à devoir demander, des larmes de rage aux fond des yeux après tout le travail accompli, de la patience, des excuses ou de l'aide à leurs clients afin de pouvoir ne serait-ce que survivre, ce qui est proprement scandaleux quand on tente de mesurer la quantité de plaisir que ces gens offrent à ceux qui passent leur porte ou devant leur stand. L’avantage d’un masque, c’est que l’on peut ruminer dessous sans être vu, ça n’empêche pas la tristesse et la colère de passer à travers, mais ça habille.

« Bête et discipliné », cela doit forcément être vrai.

Spéciale Ged-y-casse à Stéfany, Doumé, Fyfy et mon marchand des Allées.

Les mots-clés :