ROYA KILLA [Fra]

[Publié à l’origine dans C Le Mag N° 93] 

Quel est ton premier souvenir musical ? Et celui qui a déclenché ton intérêt pour le hip-hop ? Tes influences principales ? 

Karim : Mon premier souvenir musical : on m’avait offert le CD de Nas (Illmatic) un grand rappeur americain et quand je l’ai écouté sans même comprendre les paroles, j’avais l’impression de les comprendre, la musicalité était forte, la façon de rapper incroyable ! Il y a aussi le reggae, jeune j’ai été voir des sound-systems. Après en grandissant j’ai élargi mon univers musical : IAM, WU TANG, NAS, CNN... mais aussi Renaud, Ray Charles, Bob Marley, Aznavour... J’aime ressentir des émotions quand j’écoute de la musique et ces artistes m’ont donné envie à mon tour d’échanger mes émotions, mes opinions et de faire de la bonne musique. 

Pour les lecteurs qui ne connaîtraient pas ton parcours, peux-tu revenir sur les débuts de ton projet ? Et éventuellement présenter le collectif LDV 347 ? Si je ne me trompe pas Roya signifie frère en arabe, le killa serait-il une altération du Killer anglais ? D’où t’est venue l’idée de ce nom ? 

J’ai commencé à écrire à 12 ans et aujourd’hui j’en ai 25, je n’ai jamais lâché l’écriture, ça m’a toujours aidé, c’est comme un sport pour moi. J’ai commencé à monter sur scène à 16 ans, on avait un groupe qui se nommait LDV347 car on voulait représenter notre ville, on se rappait nos textes, on se rectifiait, corrigeait, critiquait pour bien évoluer, et c’est ça qui faisait notre force, LE GROUPE. On a fait plusieurs petits concerts qui nous ont donné confiance en nous et ça nous a beaucoup appris. Après on a tous fait notre chemin dans notre coin. J’ai sorti mon premier projet solo en 2006, un 12 titres qui a été commercialisé et a bien marché.  

Oui Roya veut dire frère en arabe et oui le killa est une altération de killer donc si t’alignes mon blaze ça donne "Frère tueur". Ce blaze date de mes 15 ans : quand un mec rappait bien, on disait "c’est un tueur" et il y a aussi un artiste du WUTANG se nomme Ghost Face Killa, que j’aimais particulièrement, voilà d’où ça vient, je l’ai gardé, je trouve que ça sonne bien. 

Si le CD est ton premier album officiel, certains enregistrements n’ont pas vu le jour, du moins pas officiellement. Pourquoi donc ? Est-ce pour cela que tu fonctionnes en autoproduction ? Peut-être pour garder le contrôle sur tes productions, préserver ton indépendance, les délais etc. ? 

Ils n’ont pas vu le jour car je n’avais pas de support CD, je faisais ça au feeling au début et je faisais tourner mes sons sur CD ou sur internet pour avoir des avis extérieurs. Je fonctionne en auto-production car j’aime bien reprendre mes sons, les retoucher, les peaufiner et aussi avoir une liberté artistique. Je fabrique pas ma musique pour tel ou tel public, je fais vraiment ce qu’il me plait. 

Peux-tu nous dire les thèmes que tu abordes dans tes textes ? Quel est le message que tu véhicules avec Roya Killa ? L’actualité t’inspire-t-elle pendant la création ou essaies-tu de "cloisonner" un minimum tes sujets ? 

J’ai commencé à parler de ce qui me touchait comme la pauvreté dans le monde, l’injustice, le bizness, la rue, l’époque dans laquelle nous vivons... Dans mon dernier album j’ai abordé l’union, la prise de conscience, les coups de gueule et aussi la joie. J’aime parler de ce qui nous unit, de ce que les gens ne comprennent pas trop. Le rap est une musique contestataire donc je conteste ! Je suis d’origine algérienne, musulman, je parle aussi de la mauvaise interprétation que les gens ont de l’islam, mais je me rends compte qu’il y a des thèmes durs à aborder. Je parle aussi des clichés qu’on a sur le rap car j’ai l’impression que pour ce style les gens généralisent plus vite ! Il leur suffit d’un morceau "cliché" pour qu’ils critiquent tout l’état d’esprit "rap". J’ai eu la chance de rencontrer Akhenaton de IAM, LA RUMEUR, SCRED CONNEXION... Et je peux vous dire que les mecs sont de sacrés poètes, et pour la plupart très cultivés. 

Sur une frise historique aujourd’hui très longue des LAST POETS jusqu’au rap souvent très revendicatif d’aujourd’hui, de quel courant te sens-tu le plus proche ? Les fans de 25G, PLEDGE ou du CERCLE MAKABRE, pour citer des "jeunes" ou des locaux, ne sont souvent pas du même monde musical... 

Je suis des deux courants musicaux, j’aime les musiques revendicatives, j’aime aussi la musicalité, les instruments, donc j’essaye d’être un pont entre les deux, pouvoir faire passer mes idées sur de la bonne musique, ça c’est mon kiff. Après à chacun son univers musical, car en étant rappeur et en me prenant la tête pour mes textes, mes instrus, mes enregistrements... j’ai appris à beaucoup plus respecter le travail de l’autre, je comprends mieux les autres genres de musique maintenant.. Je suis plus ouvert, je peux écouter du Aznavour tout comme du ENHANCER (metal) ou de la funk à l’ancienne comme SHALAMAR et juste après écouter du SIZZLA (reggae jamaïcain). 

On entend rarement parler de concerts de rap / hip-hop dans la région même si tu es déjà monté sur scène à de nombreuses reprises. L’absence de salle est un problème mais y a-t-il un public dans le lodévois pour vous soutenir lors des concerts ? Quelle est la vie d’un artiste rap / hip-hop dans la région ? 

Oui je trouve que ça devient de plus en plus dur de trouver des scènes mais ça se développe en ce moment, oui il y a un public lodévois même héraultais et grâce à internet les infos tournent beaucoup plus vite. J’ai eu la chance de faire la première partie de IAM pendant le festival des Voix de la Méditerranée. Il y a beaucoup d’artistes dans notre département et en 2011 il y a un réveil, on sort beaucoup de projets, maintenant il nous faudrait montrer le talent de notre département, beaucoup seraient agréablement surpris. 

Qui sont les musiciens / mcs qui t’accompagnent sur les planches et as-tu des dates à nous communiquer car je suppose que la sortie de l’album va déclencher une série de dates ? 

On a monté un label qui s’appelle 100% Rap Indé, comme le nom l’indique on travaille en totale indépendance, on écrit nos textes, on compose nos instrus, on distribue nos CDs via notre site, on fait nous-mêmes les pochettes etc... Pour tout te dire j’ai quelques dates de prévues mais pas encore confirmées, toutes les infos seront sur notre site. On est trois dans le label pour l’instant, Greg qui est rappeur, beatmaker (compositeurs d’instrus), designer. Il prépare lui aussi son album. Il y a Boby qui est beatmaker et moi rappeur. J’enregistre au studio VIZI PRODUCTION qui m’a accompagné tout le long de mon album. 

Pour finir, peux-tu nous dire où les amateurs peuvent trouver le CD ? Et quels sont les prochains projets pour Roya Killa ? Merci pour tes réponses !  

Tu peux trouver mon CD sur le site de notre label (http://www.100pour100rapinde.jimdo.com/), via nos concerts, aujourd’hui pour qu’on t’achète ton album avec la crise du disque mieux vaut aller directement voir les gens. Pour les projets futurs, je prépare un cinq titres avec GREG qui se nomme Retour vers le plus dur vol 2 qui sera en téléchargement gratuit sur notre site, on a déjà fait le volume 1 et le concept a bien plu aux gens : prendre un beatmaker différent à chaque projet. Du fait que ce soit sur le net et en plus gratuit les gens kiffent, c’est normal. Je prépare aussi une série de clips, des freestyle vidéos et aussi de nouveaux morceaux pour un réédition de mon album. 

Voilà, je te remercie pour cette interview et de l’intérêt que tu me portes, en espérant avoir été assez clair. Big uuup en tout cas !!!