InterviewsLes propos des interviewés n'engagent que leurs auteurs.
13
Avr
2007

[Publié à l’origine dans L’Occis-Mort #1]

Auteur de deux albums de BD hilarants (Le Steak haché de Damoclès en 2005 et Talijanska en 2006, tous deux chez les éditions de La Cafetière), du roman Figurec, de l’album de chanson rock LES AMANTS DE LA RUE SINISTROSE et de tonnes de strips BD dans le sacro—saint Coca zine, Fabcaro se devait de répondre aux quelques questions que je me posais à son sujet. Un point c'est tout ! Et cela donne...

Hello ! Rentrons dans le vif du sujet bédaricien ! Depuis que tu es installé à Bédarieux ta manière de travailler a-t-elle changé ? Notre bonne vieille ville t'aide-t-elle à trouver la sérénité nécessaire pour bosser tes projets ? 

Oui, vivre à Bédarieux ça a forcément changé ma manière de travailler, je travaille beaucoup plus qu'avant, vu qu'il n'y a rien d'autre à faire ici... Non, je plaisante. Mais c'est vrai que quand je vivais à Montpellier, j'étais facilement tenté d'aller traîner chez des libraires, des disquaires, sans voir le temps passer. Ici j'ai des horaires de vrai travailleur...

A quand un projet sur Bédarieux même ?

Pourquoi pas, je ne vois pas encore comment ça pourrait s'articuler dans mon travail, mais ce qui est sûr c'est que j'aime beaucoup Bédarieux. Le coin m'inspire, surtout les bords de rivière.

Après un Steak haché absolument génial (dans lequel je me suis reconnu au moins 45873 fois par page) te voilà de retour avec ce Talijanska peut-être encore plus cynique, en tout cas encore plus drôle ! Où trouves-tu l'inspiration pour pondre ces brèves déjantées ? Que signifie le titre ? Y a-t-il un rapport avec la musique de Goran Bregovic et son album Ederlezi ?

C'est ça. Talijanska, c'est un morceau qui me suit depuis mes années fac et qui est chargé de pas mal de choses pour moi. Dès que j'ai une petite baisse de forme, je prends ma guitare et c'est invariablement ce morceau qui me tombe sous les doigts. Quant à l'inspiration de Talijanska, difficile à dire... Je crois que ça vient de mon goût pour le non-sense, forme d'humour malheureusement assez peu développée en France (par rapport à l'Angleterre ou la Belgique). Dans l'humour, je suis frustré de devoir m'arrêter au second voire ou troisième degré, j'aime laisser mon imagination galoper jusqu'au point où le rationnel n'a absolument plus droit de cité.

On peut dire sans trop se planter que tu te mets souvent en scène dans tes albums et l'autodérision est très présente dans ton travail. D'’où vient cette particularité ? Il est rafraîchissant de voir quelqu'’un qui ne se prend pas au sérieux dans cette jungle de paraître ou de « je-veux-être ».

Ouais, c'est vrai que dans la plupart des autobios aujourd'hui, il y a beaucoup de nombrilisme et / ou d'auto-satisfaction. Je crois que la particularité du Steak haché vient surtout du fait que j'ai relativement peu d'égo –  contrairement à pas mal d'auteurs. Je me fous de me mettre en scène sous un jour qui me mettra en valeur. J'aurais même une tendance masochiste à l'excès inverse : plus les anecdotes qui me sont arrivées sont pathétiques et malaisantes, plus elles me font rire.

La mort revient très souvent dans les sujets de tes strips et albums. On peut en rire (et crois-moi, surtout avec Talijanska !!) mais jusqu’où ? T’'imposes-tu des limites dans le grinçant ?

No limit ! On a bien assez de limites au quotidien pour ne pas en plus s'en imposer dans le domaine de l'imaginaire. Quant au sujet de la mort, oui il est très présent dans mon travail parce que je suis de nature très angoissée, j'ai une conscience omniprésente de la vie en tant que segment. Il ne se passe pas un jour sans je pense à la maladie, à l'accident cardio-vasculaire, à l'éventualité de me faire écraser par une voiture dans l'heure qui suit... Du coup, mon travail s'en ressent d'une manière ou d'une autre.

Ton album LES AMANTS DE LA RUE SINISTROSE n'’est pas très gai non plus. Que voulais-tu faire passer comme message avec ces morceaux ?

Non non, aucun message. Juste l'envie de me lancer dans un album concept un peu sombre autour d'une banale histoire d'amour. Je crois que l'envie est partie de l'écoute de Franks wild years de Tom Waits. Et s'il n'est pas gai, c'est que je ne l'étais pas vraiment moi-même à l'époque où je l'ai écrit... Cela dit, mon écriture des chansons est toujours assez noire, même quand je suis plutôt bien, je ne sais pas d'où ça vient...

Quels ont été les retours des auditeurs ?

J'ai eu de bons retours même si c'est resté un mode de diffusion très confidentiel. Mais j'aime cette forme de distribution, un truc qui se refile comme ça, d'amateur à amateur, sans échange d'argent, sans logique commerciale.

Continues-tu toujours à composer des titres et si oui, envisages-tu de sortir quelque chose ? As-tu déjà pensé à jouer ces titres sur une scène ?

Je continue à composouiller un peu mais sans aucun projet précis. Quant à jouer les morceaux des AMANTS, on l'a fait pour quelques-uns à l'époque où on faisait des concerts. Mais les rejouer aujourd'hui, non, je suis trop vieux, ce serait pathétique... D'autant que cet album me ressemble de moins en moins à mesure que le temps passe.

Figurec a apparemment remporté un franc succès au niveau critique et public. Un projet de film était même d’'actualité il me semble ? Qu’en est-il ?

L'adaptation ciné est en cours de pré-production mais je n'en sais pas grand chose, je ne suis pas vraiment impliqué là-dedans. A partir du moment où ils ont acheté les droits, Figurec-Film n'est pas à moi, ce n'est plus le roman, ça devient autre chose. Ils en feront ce qu'ils veulent.

D’'où vient le projet de ce livre et quels auteurs, quels évènements t’'ont donné envie d’'écrire ce bouquin ?

Au départ je voulais écrire un roman sur l'hypersolitude de notre société. Mais je n'aime pas traîter les sujets frontalement et de manière réaliste, je préfère les aborder par le biais de la parabole, de la fable. Cette histoire de gens payés pour être simplement là m'a semblé être un bon matériau de départ. Et puis, petit à petit, étant un peu parano, je n'ai pas trouvé le concept si surréaliste que ça... 

Un autre serait-il sur le feu ou tu consacres-tu à la bande dessinée pour le moment ?

Je continue toujours les deux en parallèle, roman et BD. J'ai bouclé le second roman cet été. En gros c'est une parabole (eh oui, encore...) sur le passage à l'âge adulte.

Il est temps de te ficher la paix. Peux-tu nous dire quels sont tes projets pour le futur immédiat ? A-t-on une chance de voir sortir bientôt un de tes (multiples !) projets au grand jour ? Merci pour tes réponses et chapeau bas pour ton œœuvre !

En ce moment je travaille sur une espèce de « suite » au Steak haché de Damoclès. Je n'aime pas le mot « suite », mais disons qu'il s'agit encore d'autobio et c'est chez le même éditeur (La Cafetière). Et je travaille aussi sur un bouquin pour les éditions Six pieds sous terre, une petite BD qui porte un regard sur notre société de consommation sous un angle encore très non-sense... Tout ça pour des sorties courant juin 2007.

Merci à toi.

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