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13
Fév
2010

[Publié à l’origine dans Sic HS]

L'album Dañs an Diaoul (Danse du Diable en breton) contient 11 titres dont le public reconnaîtra sûrement Vive le feu ou le fameux BellARB ainsi que des traditionnels bretons remis au goût du jour et gonflés au rock dur. Pour les morceaux interprétés en breton, mes excuses, ne bretonnant pas comme beaucoup de vos auditeurs, je me vois dans l'obligation de vous demander de m'en dire un peu plus... Quels sont les thèmes abordés ? Qui écrit les paroles ?

Les textes sont des traditionnels bretons, et ne sont pas traduits car intraduisibles : ils seraient forcément déformés, la façon bretonne de ressentir les choses est tout à fait particulière. Les thèmes récurrents sont l'initiation sexuelle des jeunes filles et le départ à la guerre des jeunes bretons pour défendre leur terre. Par contre quand on trouve un texte dépassé on l'adapte. Tout est expliqué dans le livret du CD (NDG : je n'avais que le CD promo sous la main...) ainsi que les danses qui se rattachent aux morceaux. La collecte de textes anciens perpétue la tradition tout en remettant au goût du jour les trésors bretons.

(danse de l'écureuil)

Pourquoi ce choix de la boîte à rythme dans les RAMONEURS ? Personne n'évite de mentionner les BÉRURIER NOIR en parlant du groupe alors que ce sont deux entités tout à fait différentes. La question : est-ce un choix musical ou un petit clin d'œil à la vieille garde ? Peut-être tout simplement pas de batteur valide dans le coin ?

Quand on me prend, on prend aussi la boîte a rythme, on est indissociables, je bosse avec celle-là depuis vingt ans. En plus, le fait qu'il n'y ait pas de basse donne un son très particulier à l'ensemble.

Depuis 2006, les RAMONEURS escaladent les échelons de la reconnaissance, le groupe est même, après les années off, invité pour la deuxième fois au festival Interceltique de Lorient. Vous attendiez-vous à un tel succès et aussi rapide ?

Le respect dans la démarche et la collecte des textes bretons sont des raisons de ce succès, nous ajoutons une nouvelle couleur tout en respectant la tradition. A Lorient on a commencé par s'incruster, puis nous avons été invités et maintenant on y joue en tête d'affiche. On en a profité pour présenter le groupe navajo BLACK FIRE qui a le même type de démarche en faisant se croiser chamanisme et punk dans leur musique.

Les nombreux concerts du groupe doivent être pour quelque chose dans cette conquête inexorable du public et celui-ci est composé d'absolument tous les genres : fans de trad', punk, metalleux ou rockeurs sont représentés, seriez-vous devenus un lien intergénérationnel et interstylistique ?!

Les RAMONEURS deviennent un symbole du trad' en Bretagne avec dans le public des gamins ou des grands-pères et tout ça sans la moindre concession. Dans le groupe il y a deux canaux : l'historique (les sonneurs et le chanteur) et le punk (Loran + Laurent l'ingé son et ex-MASS MURDERERS) d'où cet équilibre. Et quand Louise Ebrel monte sur scène avec nous les punks prennent une bonne claque, ce public varié est la récompense de notre travail.

Question tempo les RAMONEURS ne font pas dans la dentelle (ou le plutôt le picot bigouden peut-être ?!), les sonneurs et le chanteur apparemment plutôt issus du milieu traditionnel n'ont-ils pas parfois du mal à reprendre leur souffle nyark nyark...? Quel est votre secret pour cette forme olympique ? Chouchenn trafiqué ?

On tire au max au niveau vitesse tout en restant dansables, la grosse énergie que nous dégageons peut donner cette impression de vitesse. Et puis plus de trente ans de scène pour presque tous les membres garantissent un bon échange et une certaine aisance.

Vous partagez ce soir l'affiche avec deux groupes à tendance trad', j'ai nommé GOULAMAS'K et SPI ET LA GAUDRIOLE. Que pensez-vous de ce retour du trad au sein du giron rock'n'roll ? A la suite de groupes tels les mythiques POGUES ou encore les DROPKICK MURPHYS dans le rock costaud, ils essayent de remettre au goût du jour l'appartenance à une culture qui leur est propre, attitude qui semblait être oubliée au milieu d'une scène rock uniforme et aseptisée, peu concernée par grand' chose. Vive la diversité !

Aujourd'hui le rock c'est aussi du trad' depuis le temps qu'il est là, rentré dans les mœurs, le punk aussi, et comme tous les espaces de liberté sont menacés, le punk représente une issue de secours contre une oligarchie qui se gave, un système oppressant. Il y aura toujours des punks, et aujourd'hui plus que jamais. Personne ne doit supporter la situation actuelle. La politique française basée sur la répression... D'ailleurs on vient en Occitanie, pas en France. Le punk, c'est de l'énergie pure, et pas forcement à voir avec le duo crête / bière, c'est de l'action directe artistique par exemple pour la résistance bretonne, chti, occitane ou basque. Les Bretons sont très travailleurs et sur terre et sur mer et quand ils rentrent ils aiment de bonnes fêtes mais aujourd'hui tout doit fermer tôt grâce à Sarkozy. Pourtant en Bretagne la bière est une tradition. Les fêtes là-bas sont bon enfant, c'est la tribu qui se réunit. Tout se passe bien, sans violence... Mais l'État a peur que gens se connectent positivement. La Bretagne ne se reconnaît pas dans cette France raciste, libérale à l'américaine. Ce système détruit la planète pour le profit, Sarko relance même le nucléaire ! Autre sujet, la dépénalisation du cannabis. L'alcool est clairement la défonce permise par l'État. Par contre le cannabis qui est une plante incroyable à tous les niveaux reste prohibé, je refuse de participer à ça et c'est pour ça que je me suis proclamé réfugié politique en Bretagne. Je ne peux pas cautionner tout ça. « La fête oui, mais la lutte aussi » !

Quels sont les futurs projets du groupe pour 2010 ? Des dates importantes à annoncer ?

L'album sort bientôt 1 avec beaucoup de participants dont BLACK FIRE, avec un morceau en soutien à Leonard Peltier, qu'Obama, un vrai visage pâle en vérité, devait faire libérer, un mensonge de plus.

Les derniers mots sont pour vous, merci pour vos réponses et bon concert !

Nous signalons que nous sommes un groupe yes future, qu'il y a des choses à faire pour nos enfants, notre et leur planète, le prochain album Amzer an dispac' h (Le temps de la révolte) arrive bientôt mais toujours dans un esprit bon enfant, festif, on est pas des guerriers mais des bardes. Un artiste pas politisé n'est pas un artiste car seuls les artistes sont libres aujourd'hui de s'exprimer je n'ai jamais été intermittent en trente-trois ans de musique pour être libre, un OVNI sûrement mais j'aime bien être la où il n'y personne.

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