Chroniques concerts
23
Avr
2011

19 avril, pas découvert d’un fil,

7h20 : c’est sur ce banc, m’efforçant de noyer mon esprit dans le chant symphonicostrident des oiseaux matinaux que le périple se précise, c’est aussi à cet instant que je la sens pour la première fois de cette longue journée, une aura sombre et discrète trouble la clarté du soleil, un seul nuage et pourtant la menace est là, tapie... Je ne La redoute pas, Elle est moi. 

 

8h10 : C’est dans ce bus que je me dis que le temps où partager une clope avec neuf bouches variablement soignées est bien finie, que voir cracher des collégiennes des molards chargés de goudrons et de reste de lait en brique de supermarché est loin à présent, même l’horreur meurt. 

 

9h40 : C’est dans cette gare grisâtre et taggée avec le plus grand manque de poésie possible que s’est mis en place le navrant spectacle de vieillards tenant très fort leur valise aussi vide que leur existence, de types sûrement plus tunés que moi qui me délesteraient bien d’un euro que je n’ai même pas "pour prendre le train et aller bosser", un sourire transformé en grimace apitoyante, où une pauvre dame balaie les merdes que balancent les porcs, c’est là que se précise le voile étrange, comme quand des binocles crades empêchent une vision optimale, il grignote petit à petit le phare d’Apollon. Je suis confiant, pourtant ce train qui passe à toute allure aurait pu écraser quelqu’un je le sens, les vibrations puissantes et sourdes des rails dérangent les âmes fauchées par le chemin de fer, la menace est là, je ne La redoute pas, Elle est moi. 

 

11h00 : Sais-tu petit scarabée pourquoi tu ne peux plus, comme au bon vieux temps des cancers des poumons autorisés en wagon, ouvrir les fenêtres des trains ? Tout simplement pour éviter de trouver jonchant les rails les cadavres des nazes que l’on ne pourrait s’empêcher d’éjecter avec rentré dans la gorge leur téléphone mobile importun. Une pensée émue aux andouilles qui, le jour où certaines rues sont fermées pour laisser place à un marché, continuent à marcher sur les trottoirs alors que les rues sont piétonnes et se bousculent en faisant les gros yeux. Madame est de ceux-là, elle s’assiéra donc malgré un wagon quasi vide à la place 76 voisine de la mienne parce que vous comprenez etc. La gare enfin, la marche, les gaz, Côte Pavée, terminus, départ, Mix’Art. Bâtiment énorme dans l’immédiate banlieue de Toulouse, le Mix’Art Myrys est occupé par un collectif qui semble, c’est mon premier contact avec eux, être friand d’art contemporain et urbain, la récup’ est la loi, des milliers de mètres cubes de matos en vue de créer, rien ne se perd mon cher Antoine, rien ne se perd... Sur la scène où les MASTER s’apprêtent à balancer c’est un peu pareil, un invraisemblable amas d’instruments occupe les planches, un épais nuage d’encens fukushimesque sature l’air, le sort en est jeté, cette soirée se vivra sous le signe du recueillement, fût-il urgent. Pour l’instant MALHKEBRE tentent une balance qui n’est pas gagnée pour autant, un tour d’inspection des lieux s’impose. Impressionnant bric-à-brac hétéroclite en vue d’installations et autres performances. Le labyrinthe mène à la "salle des cérémonies", sur le chemin on peut croiser du metal en quantité (forcément) industrielle, des personnages délirants confectionnés DIY, même un avion trône au bout de la première allée, donnant l’impression étrange d’être dans un musée du futur exposant les vestiges de notre présent. Quelle chance de posséder un lieu aux dimensions gigantesques ! 

 

21h : la menace est là, je ne La redoute pas, Elle est moi, mais pas seulement. MALHKEBRE n’arrivent pas en terrain conquis, le black metal des plus fanatique ne semble pas ici participer de l’habitude. Et pourtant dès le début du rituel sonique c’est un public relativement nombreux qui occupe l’espace et manifeste même franchement un intérêt à ce sabbat infernal. La set list pour qui a déjà subi les assauts du groupe ne surprend pas mais l’urgence dans laquelle s’exprime aujourd’hui le Messager ajoute beaucoup de visuel à une prestation sauvage. Et le public, encore une fois, reste et prend part. Louanges à toi Seigneur pour une assemblée telle que celle-ci où l’osmose s’installe au nom, sacré ! de l’Art. 

 

MASTER MUSICIANS OF THE BUKKAKE est un collectif dont les gigs ne peuvent laisser indifférent. N’oublions jamais la présence dans leurs rangs de membres de BURNING WITCH et EARTH... Il suffit de les voir aborder la scène grimés en bédouins et ouvrir la boite de Pandore sonore : à mi-chemin entre rituel transe et show quasi bruitiste, disons aéro-drone, le groupe livre quelques extraits de leurs albums (le troisième arrive) en versions of course extensives à souhait dont de mémoire d’un cerveau à efficacité variable le dernier morceau pouvait par exemple faire penser à, lancinant et graisseux, génial, à du BLACK SABBATH repris par TINARIWEN et pourquoi pas tant qu’on y est du QUEEN OF THE STONE AGE par KRAFTWERK. Le groupe charismatique et hypnotique usera de tous les artifices pour mettre l’audience sur les rotules, et sourde en sus : trompes tibétaines, gong, deux batteries, un psalmodieur halluciné et autres multiples présences sonores. Une prestation étrange, shamanique, mais massivement baffesque, l’éclate pour les aventuriers des tympans. 

 

TURBO SEMELLE vient trop tard, personne ne devrait pouvoir passer après cet incroyable début d’affiche, et c’est bien dommage car le groupe semble maîtriser, malgré des déguisements dignes de GRONIBARD, une scène au moyen d’un rock prog aux tendances free jazzy. La menace est loin, nous aussi. 

 

[A suivre dans OBITUARY [Usa] + GRAVE [Swe] + PATHOLOGY [Usa] à Saint-Jean-de-Védas, Secret Place le 20/04/11

 

Spéciale Ged-y-casse à Frater Yannick Le Béguec, Abatwar for life, même dans la Mort...

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