Des cris et des crêtes - Chanter punk en français (1977-1989) de Olivier Migliore (En marge ! / Riveneuve - 2020)

« Le punk, c'est de la musique », voilà, c'est dit.

L'auteur part donc du principe que le genre se plie à l'analyse strictement musicale afin de décrire précisément ce qui fait du punk le punk. Alors, quel est l'assemblage qui permet de reconnaître précisément un morceau punk d'un autre morceau, que nous dit ce morceau par sa structure, ne se révèle-t-il pas plus compliqué que ce que la légende raconte au sujet de la simplicité proverbiale de ces gens analphabètes autoproclamés dans le genre musical ? La façon de chanter, de prononcer, ne crée-t-elle pas chez beaucoup une sorte de personnage vocal collant à l'image et l'attitude générales d'un groupe ?

Après avoir découpé les périodes de 1977 à 1979 pour les pionniers, une deuxième vague jusqu'en 1981 puis à partir de cette date la formation d'une véritable scène indépendante, l'auteur, « en sollicitant les outils de la musicologie, de la linguistique et de l'analyse du signal acoustique, […], analyse l'expression vocale du punk en considérant trois aspects envisagés de manière interdépendante : le texte, la voix qui porte le texte, et la prosodie musicale » et en soumettant à la question sept morceaux des années héroïques qui ont été choisis à but d'analyse afin d'en déterminer les caractéristiques, communes ou pas. Note : les non-scientifiques et les allergiques à l'informatique risquent de s'arracher les cheveux à la lecture du milieu de l'ouvrage dont les seules illustrations sont des captures d'écran, des tableaux, des extraits de partition et des graphiques (d’ailleurs une erreur d'impression à la page 73 mange un peu du texte).

La spontanéité crue du punk nécessitait-t-elle une telle étude ? La question se posera sûrement, il n'empêche que soulever le sujet ne manque pas d'intérêt et dénote d'un certain courage au vu des embûches que la langue elle-même, ainsi que ses hirsutes interprètes, posent sur l'itinéraire d'un chercheur vers la vérité dite scientifique. Une façon de voir les choses qui rappelle une fois de plus que le mépris dont sont victimes les musiques populaires est en train de passer grâce à une génération de chercheurs plus jeunes et plus ouverts dont les sujets d'étude ne manqueront pas d'interpeller les plus curieux, espérons-le en tout cas car l'objet est intéressant.

Bien sûr, tout ceci nous a donné envie, comme si on en avait besoin, de remettre un MÉTAL URBAIN sur la platine !

261 pages, 20 €
ISBN : 9782360135790