Comme on en a pris l'habitude depuis des années, on ne se limite jamais au concert même, on cause aussi du voyage, des atmosphères qui précèdent avant de livrer un reportage tout à fait personnel de ce qui nous est passé entre les yeux et les oreilles, un peu comme le chiffon dans Don Salluste.
Les péripéties inhérentes à la plume indépendante, bénévole et passionnée, qui plus est non véhiculée, se transforme souvent en longs casse-tête et en une série de chapitres tout à fait abscons dans quelque magazine rock que ce soit. Heureusement qu'il n'en reste plus que quelques souvenirs émus.
Le début du trip n'est pas triste, ou presque... L'envie de revoir à Béziers le château pinardier de la Devèze, à proximité du boulot de Madame, se transforme direct en envie de fuir, deux gamines se defoncent ballon sur ballon dans une bagnole, le Mén'art de vivre n'est pas au programme de tous, le sol constellé de preuves de destruction de neurones est hallucinant, mais pas plus qu'un deuxième véhicule cette fois garni de mecs, le bruit du gaz remplaçant celui de la clim', la génération sans parents dans toute sa splendeur n'est qu'au début de sa décomposition, que son règne arrive...
Pour la peine, tentons la kermesse d'école, fin d’année oblige, puisque le calendrier tient visiblement des farces et attrapes, quand on n'a pas l'impression qu'il y a plus de vacances que de leçons, une fiesta miniature qui devrait toutefois nous éviter les désagréments du coin. La souffrance auditive passée, decollage, on aura pour souvenirs surréalistes ces gens qui n'hésitent pas une seconde à s'allumer des clopes dans une cour d'école maternelle ou à faire pisser leurs gamins quand des toilettes sont à royalement quatre mètres trente-deux. L'absence de méfiance chez les enfants est aussi incroyable de nos jours, on le répète donc : no future ; et c'est tant mieux.
Sociologie toujours : l'autoroute. Il ne sera pas dit que le code de la route sera plus respecté que celui des établissements scolaires puisque les publics sont les mêmes : des gens qui veulent aller toujours plus vite sans pour autant se dire un instant qu'un éventuel accident pourrait être mortel, particulièrement pour les autres. Un coup de boule à tous ceux qui prennent la voie centrale pour la voie définitive du départ à l'arrivée, coup de portière à tous ces camions qui mettent quatre kilomètres à doubler des escargots qui accélèrent au même moment et bien sûr coup de bazooka à ceux qui font les tarifs - injustifiés au passage - des péages et des boutiques.
Après le mariage (tout est véridique) puis la soirée, puis le retour pour un nouveau départ, c'est aux environs de Paris que l'on se répète encore et encore qu'il ne sera jamais au grand jamais possible pour une seule cellule de notre corps de supporter la vie dans des conditions pareilles, particulièrement si on ajoute au travail les deux heures avant de pouvoir y pointer. Une circulation foldingue, une pollution incroyable, autant envisager le seppuku immédiatement car l'aliénation globale a un nom, elle s'appelle la ville. Bienheureux ceux qui la supportent, encore plus heureux votre non-serviteur d'en repartir.
Mais pour l'heure, il faut quand même balancer quelques mots au sujet des organisateurs du concert qui n'hésitent pas, l'après-midi même de l'événement, à avancer de trente minutes un planning déjà totalement ridicule : début à dix-huit heures. Donc dix-huit heures moins trente minutes = dix-sept heures trente, merci Bertrand Renard, tout ça alors que même un dimanche des gens sont obligés de travailler et on suppose que soixante-dix-huit virgule neuf pour cent de la population des quarante mille fans des têtes d'affiche viennent de la province, parfois très éloignée, et même de l'étranger. On ne dira jamais assez le mélange de colère et de mépris qu'on aimerait casser sur la tête de ces gens.
Du coup, quand on déteste louper les premières parties et que cela arrive, la mauvaise humeur, certes intérieure, est de la partie. LORD OF THE LOST est zappé et les australiens AIRBOURNE (prononcez hair-burne) ont déjà on le suppose joué une bonne partie de leur set quand nous arrivons dans l'arène. On dira ce que l'on veut de l'acoustique de la salle, en tout cas ce qui est clair, c'est que pour AIRBOURNE la bouillie qui sort des baffles semble basée à 100% grosse caisse, et on ne peut pas dire que le batteur utilise grand-chose de plus sur son kit. Rires. Huhuhu. Etc. Toujours plus de refains que de couplets au programme, toujours autant de perte de voix chez Joel, on a après avoir plusieurs fois vu le groupe la sale impression qu'il se repose sur ses lauriers pourtant obtenus de haute lutte. Ce n'est peut-être qu'une impression, en tout cas on apprécie beaucoup le bel hommage au crew des roadies de La Vierge de Fer, on espère revoir le groupe des frangins O'Keefe dans de meilleures conditions que cette ouverture - techniquement ou pas - fort brouillonne.
Un des groupes que l'on a le plus vu sur scène et qui ne déçoit jamais tient son pari de bonification avec l'âge, ce qui n'est vraiment pas le cas pour tout le monde dans la tranche d'âge concernée. IRON MAIDEN a misé gros sur le décor, est doté d'un son cyclopéen et de musiciens tout simplement géniaux, on a juste le bémol que Bruce Dickinson, nonobstant une forme vocale exceptionnelle, fait un petit peu ce qu'il veut sur le tempo qu'il décide, au risque de tomber légèrement à côté du métronome. Ceci dit, à ce jeu-là il ne battra jamais le public qui death-y-dément devrait être plus assidu en cours de musique, particulièrement celui où l'on apprend à taper avec ses doigts sur la table le rythme du walkman tellement on s'ennuie dans les matières scientifiques. Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour énerver les profs de maths hein ! Cette salle est gigantesque (40 000 pignoufs à l'intérieur quand c'est blindé) mais n'est pas pleine, pas mal de gens, après ce report d'année en année, ont préféré aller camper à la fête à Neuneu et on se sent d'autant mieux en osmose avec le groupe qui fait bien ce qu'il veut de son côté tant qu'il n'abandonne pas le circuit des salles qui pour nous est le seul supportable à de rares exceptions près. On est bien content d'une setlist qui comporte trois morceaux récents en entrée, quelques classiques et quelques surprises pour deux heures qui renvoient comme d'habitude la majorité des groupes en activité à celle qu'ils n'auraient jamais dû quitter : le crincrin dans le local de répétition. Steve Harris est un dieu et on ne le dira jamais assez :
UP THE IRONS FOREVER !!!
Spéciale Ged-y-casse aux compagnons de route géniaux Anaïs, Aurore et Stéphane (Eddie, le frère qu'une autre mère m'a donné il y a quarante ans) mais aussi à Camille et Arnaud qu'on a failli retrouver sur place.
P. S. : pour ajouter une note au guide du Kroût'hard, n'essayez jamais de trouver quoi que ce soit à manger à proximité de la salle un dimanche soir même à une heure qui ressemble presque à celle du goûter tant semblent régner les les couche-tôt - qui ne travaillent pas plus que nos-zigues - voire les tenanciers de gargotes fort impolis.
P. S. 2 : puisqu'heavy-demment on ne peut pas prendre de photos ni quoi que ce soit d'autre d'ailleurs dans ce genre de temple du bruit aux dimensions hyper-exponentielles, on a décidé de faire une petite collection des visuels successifs que l'on a vu passer pour ce concert. Retour vers le futur d'un passé qui ne s'est jamais produit à moins que allez voir là-bas si on n'y est pas, on sait jamais.
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