Chroniques DVD
14
Avr
1999

Les étoiles évaluent le plaisir ressenti à la découverte des œuvres, rien à voir avec une quelconque note !

Genre : blaxploitation

Scénar : une bande de gamins noirs qui jouent au foot (américain bien sûr), un est témoin du viol d'une jeune noire par deux flics, voilà de quoi susciter une carrière dans l'agitation politique non ? Johnny vit aussi le refus des blancs à employer des noirs même diplômés, l'empressement des policiers à arrêter les gens, surtout ceux de couleurs… Pendant que le ghetto noir grouille de rats et couve une méchante fièvre, l’homme blanc semble conserver les moyens de vivre sans les mêmes problèmes. Les noirs soudain « choisissent d'être autosuffisants » comme tout le monde vu que, c’est bien connu, les hommes naissent tous égaux. Mais le fossé s’est creusé entre les noirs qui acceptent la situation pour nourrir leur famille (Papa cire les chaussures, Maman fait des ménages) et ceux qui veulent la combattre à tout prix, bien que l’on trouve aussi des nuances chez les activistes. Les ultraviolents prendront-ils le pas sur les raisonnables ? Cibles perpétuelles de brutalités policières et parce que le « gouvernement devient destructeur n’en assurant plus [leurs] droits » : voilà, c'est gagné, c'est l'émeute perpétuelle dans le crâne des noirs et bientôt dans la rue. A armes égales avec l'autorité croyez-vous ?

A la suite des pionniers Chester Himes 1 (qui a largement inspiré le courant) et Melvin Van Peebles, la vague de la Blaxploitation déferle. Émeute à Los Angeles, présenté ici en version director’s cut, est un intéressant témoignage d’une époque, sûrement construit avec de petits moyens (c’est après tout le premier film d’Oscar Williams), mais qui offre le haut de l’affiche à des acteurs assez connus dans le genre (et au-delà) : Billy Dee Williams (qui apparut entre autres dans les deux derniers films de la vieille trilogie de Stars Wars mais aussi dans le Batman de Tim Burton), D'Urville Martin (Rosemary's baby, Black Caesar, Big score…), Raymond St. Jacques (Les Bérets verts, Le Casse de l'oncle Tom, Invasion Los Angeles…) pour les noirs, mais on trouve aussi des blancs comme la sale gueule de R. G. Armstrong (Coups de feu dans la Sierra, Major Dundee, Pat Garrett et Billy le Kid, Mon nom est Personne, Predator…) et la mignonne Celia Milius (qu’on aperçoit à peine dans Conan le barbare, son nom ne vous dit-il rien ?).

Ce film fort militant, doté de dialogues incisifs, de scènes violentes (d’innombrables meurtres de noirs et flics confondus avec parfois quelques jolies giclées de sang, mais aussi des images crues d’amournoir, on imagine le scandale chez les puritains, encore très souvent racistes, de ces glorieux États-Unis des Seventies…) et de très nombreux flashbacks fournissant le tableau en détails et l’histoire en arguments, sera évidemment interdit ici ou là à sa sortie. Il n’oublie pourtant pas au passage - dans un esprit de justice ? - de rappeler que les vieux, même blancs, font aussi partie des laissés pour compte, que les juifs sont souvent regardés d’un mauvais œil par une partie de la population, que certains vétérans du Nam sont réduits à la toxicomanie pour gommer leurs cauchemars… Ce constat amer est néanmoins acidulé par une bande originale ultra cool et groovy à donf (un must pour les bassistes et les batteurs) qui convient parfaitement pour ce défilé de coupes afro choucroutesques, de cols pelle à tarte e tutti quanti.

Bonus (BONI ? J’ai aussi fait du latin, mais là c’est juste ultra moche) : un extrait de Darktown strutter enluminé par un morceau des DRAMATICS, petits rois du funk groove, le documentaire « les meilleures musiques de la Blaxploitation » (entretien avec les collectionneurs Blaise Schmitter et Jean Dellemotte, 50’), érudit et agréable, d’autant que les bonhommes nous convient à une discussion vinyl-only ou presque + une dizaine de trailers (25’) dont certains mettent carrément l’eau à la bouche pour différentes raisons (Black gestapo, Dr Black & Mr Hyde, Penitentiary…) sans oublier une petite présentation du film par Catwoman. Une édition franchement classe. Keep smoking, cat !

1 voir Le Casse de l'oncle Tom de Chester Himes (Editions de Saint-Clair / François Beauval - 1977)

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