Le Petit monde de Don Camillo de Julien Duvivier (avec Fernandel, Gino Cervi, Vera Talchi, Franco Interlenghi, Sylvie, Charles Vissières, Clara Auteri Pepe, Italo Clerici, Peppino De Martino, Carlo Duse, Manuel Gary…) 1952

Genre : la zizanie

Scénar : en 1946, les communistes proverbialement athées gagnent les élections dans la petite ville de Brescello, au Nord de l’Italie. Le curé Don Camillo enrage d'autant qu'il a pris la veille une raclée par « un inconnu ». Jésus, avec qui il communique directement, tempère pourtant son bouillant serviteur. La « réaction », elle, désespère quand Peppone Bottazzi le rouge jubile : il construira sa « Maison du Peuple » ! Mais Don Camillo a les cloches faciles quand il s'agit de manifester son opposition à la politique municipale. D'ailleurs une bonne partie de la population est avec lui. Et voilà que survient la naissance d’un bébé Bottazzi que les parents voudraient discrètement baptiser… Les mauvaises habitudes ne se perdent pas, et le malin Camillo se frotte déjà les mains…

ZE comédie de duel dans toute sa splendeur ! Au centre d’une bagarre politique qui oppose de bons bougres pour le pouvoir s’opposent deux fortes têtes absolument impayables : Gino Cervi, le maire colérique aux faux airs de Staline mais au grand cœur mal dissimulé et Fernandel, curé pas très catholique (death-y-dément, après L’Auberge rouge ¹…!) qui peut oser un mensonge, un coup de pied au cul et même de menus larcins. Ils échangent de plus entre deux coups de poings des dialogues savoureux signés Julien Duvivier et René Barjavel. Cette Italie de dessin animé à l’accent qui chante, né du cerveau fécond de Giovannino Guareschi, à été filmée en partie à Cinecittà mais aussi et surtout à Brescello même, donnant au récit un cadre crédible et charmant.

Mais sous le prétexte d’une comédie, ses concepteurs et l’écrivain, à la manière d’un Marcel Aymé qui aurait mis de l’eau dans son vitriol, en profitent pour évoquer la grande pauvreté de l’immédiat après-guerre, le chômage, les rivalités datant de la résistance, la stupeur idéologique d’une partie de la population qui pense d’abord à survivre plutôt qu’à s’encarter. L’histoire dans l’histoire, romance directement empruntée à Roméo et Juliette, montre bien qui si homérique soit-elle, l’éternelle bagarre droite-gauche (pour caricaturer un peu) ne peut empêcher des passerelles, mais Cupidon, c’est bien connu, s’en fout…

Comme tout grand succès public, le film engendrera des suites, pour le meilleur et pour le pire…

¹ voir L’Auberge rouge de Claude Autant-Lara (avec Fernandel, Françoise Rosay…) 1951.