Marie, l'épouse de Bras de Fer - Tranches de vie Nîmoises 1857-1942 de Charles Cabot (Lacour - 1999)

Eh bien oui, cette fois c'est officiel, fini les blagues sur les gardois !

Ce n'est pas tous les jours que l'on tombe sur une monographie à propos de sa propre famille, fût-elle inconnue à cause des aléas de l'histoire, des divorces et des morts…

Décédée en mars 1942 (le récit commence par là avant de reprendre le fil chronologique), Marie Figuier laissera à son petit-fils Charles un souvenir très fort au point qu'il entreprend d’écrire cette histoire complétée par les autres membres de la famille.

Tout commence en 1870, année maudite pour le pays qui vit sa métamorphose en république en pleine guerre contre la Prusse. En province comme ailleurs, les hommes se font rares et les courriers qu’ils font parvenir à « l’arrière » sont attendus, pour dire le moins. Une gamine de Bouillargues près de Nîmes, Marie Figuier a treize ans et accomplit l'exploit d'être à la fois bonne élève et habile de ses mains. Elle lit donc régulièrement les lettres des soldats à ceux qui ne le peuvent et en rédige même les réponses. Parmi les gens qu’elle soutient se trouve Marguerite Aiglon, bien lotie avec trois hommes absents (et turbulents) : deux soldats de fils et un mineur de mari. Mathieu, le plus jeune fils, a déjà un surnom , « bras de fer », et via les lettres qu’elle lit, Marie en tombe amoureuse malgré son très jeune âge.

Le retour du jeune homme le voit rejoindre ses compagnons de fêtes où il se distingue dans l'art de conter, de chanter et…de boxer. Mais un autre pan de ses activités bien plus illégal, la contrebande, redevient son principal gagne-pain jusqu'au jour où Marie court l'avertir que les gendarmes s'intéressent à lui, elle parvient même à le faire embaucher pour un emploi honnête sur une exploitation agricole, les deux s’y rapprochent, couvés par les yeux de leurs proches qui n'y trouvent pour le moment rien à redire, au point même qu'ils organisent leurs fiançailles mais quand le mariage s'approche, la contrebande reprend le jeune garçon. Celui-ci voudrait bien arrondir le tout petit pactole prévu pour le voyage de noces qui les mènera de chez des oncles et tantes de Nîmes à des tantes et des oncles de Marseille.

Après le voyage de noces, une petit Suzanne nait quand Mathieu lui aurait bien voulu un garçon mais ils n’auront pas d'autres enfants et le sujet sera cause de mélancolie chez l’un comme chez l'autre. Ils auront par contre très rapidement le bonheur de voir leur enfants épanouie et douée dans tout ce qu'elle entreprend et celle-ci, déjà dans la vingtaine, rencontre un certain Philippe Louis Laval, frère d'une de ses amis. Un peu plus jeune qu'elle, il finit par s'en faire aimer et l’épouse début 1896. Ils auront cinq enfants : Charles, Marie-Louise, Ernest (qui mourra d’une pleurésie à trois ans) Joséphine et Rose. Mathieu « époux turbulent et aventureux » est avec le temps devenu un grand-père affectueux mais une nouvelle guerre, mondiale cette fois, s’annonce et va infliger de profondes souffrances à la famille.

Car Charles Laval s’engage, se retrouve cavalier dans un régiment de cuirassiers et meurt au combat à Thourotte dans l'Oise le 11 juin 1918.Le traumatisme dans la famille est total. Joséphine rencontrera juste après la guerre un soldat qui vient de finir son service militaire, Honoré Dumazer, mon charismatique arrière grand-père, Rose elle épousera Fernand Cabot qui deviendra entre autres le compagnon de chasse d’Honoré. Les descriptions, pour revenir au livre en lui-même, sont faites dans un beau langage et on découvre beaucoup de l'histoire du Gard depuis la Révolution grâce à une mémoire savamment entretenue par différents membres de la famille, c’est de là que naît la grande Histoire, de ces histoires orales qui racontent ce dont on a été issu et qui expliquent parfois certaines de nos actions.

229 pages

ISBN : 9782844066701