Chroniques DVD
10
Avr
1999

Les étoiles évaluent le plaisir ressenti à la découverte des œuvres, rien à voir avec une quelconque note !

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Genre : un ver vorace dans un fruit pourri

Scénar : « Je remercie la Providence de m'avoir envoyé ici » qu’y disait John McBurney… Quand on va à la cueillette aux champignons, on ne s'attend pas forcément à tomber sur un homme criblé de balles. Alors que le nordiste s'écroule à ses pieds, la fille n’hésite pas à le sauver bien que les sudistes soient dans les parages. L’homme a tôt fait d'avoir un comportement déplacé avec elle (« alors je peux t'embrasser » lui dit-il quand elle lui révèle qu’elle a douze ans) et il se retrouve précisément dans un institut de jeunes filles. Là vit en autarcie et un peu en dehors du temps une demi-douzaine de femmes ayant la frousse d'être violées et tuées car après tout, les nordistes n’ont-ils pas la réputation de mettre à sac les propriétés ? Du coup certaines des pensionnaires veulent le balancer aux sudistes (la directrice menace d’ailleurs de le remettre aux soldats dès qu'il sera guéri) mais d'autres plus délurées s'intéressent plus franchement à ce diabolique coq en pâte qui, après avoir tenté de faire ami ami avec l’esclave noire, creuse des petits trous en s'avèrant très psychologue et perspicace, il n’hésite d’ailleurs pas à se faire passer pour un quaker pour émouvoir son public fébrile. Mais tout n’a qu’un temps…

Tout est grand dans ce film (à part ce titre français qui comme souvent met à mal la subtilité de l'original), à commencer par ce générique défilant sur des photos de la guerre de Sécession (on oublie souvent que ce conflit a été le premier à être photographié et dont les témoignages et impacts palpables sont encore visibles partout chez les ricains et pourtant pas si diffusés que ça) et une musique de Lalo Schifrin qui va vite devenir troublante à l'image de l'histoire. Histoire adaptée d'un roman de Thomas Cullinan (1919-1995), le premier et seul traduit en France (et on salue tant qu’à y être le travail de sape de Passage du Nord-Ouest, excellent éditeur tarnais !), qui raconte cet institut qui vivote quasiment au mépris des combats qui se rapprochent pourtant de plus en plus. Et avec eux la peur, que la nature humaine n’atténue pas. Drôle d'ambiance en effet à l’arrivée de l’homme-loup-dans-la-bergerie : les poules se remettent à pondre, les femmes se pomponnent, les filles semblent s'intéresser d’un coup aux instruments de musique qui sont bizarrement entreposés là où le monsieur dort… Une vraie Sainte-Barbe à laquelle il ne manquait plus que l’allumette, la puberté et ses pensées impures se chargeant de jouer les grattoirs.

Du bistre des photos vers la couleur éclatante du film, des roulements de tambours militaires jusqu'au silence de mort, voici un vrai délice de noirceur vénéneuse et sûrement le rôle le plus sulfureux de Clint Eastwood incarnant un manipulateur hors-pair, diable au visage d’ange animant en s’amusant beaucoup un festival d'allusions pour le moins insidieuses. Le fait que l’on entende les pensées des filles, pas toujours très pures, tout en évoquant les hommes du dehors, sûrement bien pires car depuis longtemps à la guerre sans avoir vu de femmes (comme s’il fallait un prétexte pour se comporter en animal !), tout ça en dit long sur l’hypocrisie de la religion et de la morale. Alors si en plus tout ça est superbement filmé par le toujours très capable Don Siegel (jolie jeu de caméra pour signifier l'évanouissement de l'homme au passage, mais cela vaut aussi pour des scènes éprouvantes comme celle d’une amputation), qu’ajouter de plus si ce n’est un vibrant bravo ? On note au passage qu’un certain Buddy Van Horn qui aura son importance est encore parmi les acteurs et qu’il est difficile de trouver un casting féminin aussi convaincant. Un pur classique du westhriller !

La phrase de film : « Sacré nom de dieu, il aurait mieux fallu me châtrer !! »

Bonus : bande-annonce

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