Documentaire
08
Avr
1999

Les étoiles évaluent le plaisir ressenti à la découverte des œuvres, rien à voir avec une quelconque note !

Ancien policier et résistant,

puis très au fait des crimes allemands en France contrairement à tous ceux qui réécrivent (déjà !) l’histoire depuis des années, Jacques Delarue a choisi quatre exemples pour ouvrir une page sombre qui ne peut être oubliée ou contestée vu l’énorme documentation disponible. Pas encore en possession des connaissances actuelles ni des théories rentre-dedans d’un Robert Paxton par exemple, il y a cinquante ans déjà on questionne le comportement de la France pendant l’Occupation et l'enrichissement prodigieux de certains pendant que beaucoup crèvent la faim ou face à un peloton d'exécution.

Premier sujet : Les Dessous du Marché Noir

Projet préparé bien avant la seconde guerre mondiale, les officines - mises en branle par l’agent de l’Abwehr (contre-espionnage allemand) Hermann « Otto » Brandl - que vont s'empresser d'ouvrir les grands services du Reich (marine, Luftwaffe, SS etc.) vont rendre le marché noir inévitable vu que « Les frais d'entretien des troupes d'occupation allemandes sur le territoire français seront à la charge du gouvernement français » dont les finances seront vampirisées à l'extrême pour le grand profit de certains et le malheur de la majorité. Les officines vont de plus très vite s’entourer de repris de justice mais aussi de quelques juifs (l’Occupation est parfois propice à l'absurde, l’inventaire des possessions des Joanovici ou Skolnikoff sera hallucinant) qui faciliteront le travail de « rachat » des biens en définitive spoliés par l'occupant et leurs sbires. La corruption se généralisant jusqu’au point de non-retour, les auxiliaires des nazis des rue Lauriston et rue de la Pompe vireront bientôt vers la chasse aux résistants et à la torture…

Deuxième sujet : Ce que fut la L. V. F.

Dès l'invasion de l'URSS, les collaborationnistes (Deloncle et Déat en tête, Doriot ensuite) exultent mais il leur faut montrer une énième preuve de loyauté à leurs maîtres méfiants. De leur propre initiative, ils proposent la création de la L. V. F. Rapidement, ces optimistes forcenés comprendront que la France y sera encore de sa poche ! Et puis les volontaires ne se précipitent pas malgré les annonces des leaders collabos et une propagande acharnée. Coup de tonnerre, le jour du lancement on tire sur Laval et Déat ! Pressant la gâchette, un militant…d’extrême-droite ! Farouchement anti-collabo, Paul Collette sera le prétexte de disputes entre les divers mouvements pro-fascistes qui bien sûr s’entre-accusent (adieu R. N. P., ex-futur parti unique, déchiré depuis le début par les incessantes querelles entre ses chefs !) avant d'être jeté de prison en prison jusqu'en Allemagne ou il survivra aux camps !! La Légion tricolore qui s'ensuivra sera aussi un beau pétard mouillé dont l’histoire sera truffée de trahisons et de malversations.

Troisième sujet : La Destruction du Vieux Port de Marseille

Encore un chapitre sombre que ce plan de destruction du Vieux Port de Marseille, ordonné au mépris de nombreuses victimes sur des présomptions et des clichés hérités du cinéma et de la littérature mais qui aurait pu coûter beaucoup plus de vies que celles qui finalement seront sacrifiées, les nazis tablaient sur pas moins de 40 000 dans leurs prévisions !! Précision qui a son importance, l'auteur était présent en personne lors des opérations qui gardent encore aujourd'hui, même pour lui de son vivant, une grande part de mystère

Dernier sujet, et pas des moindres : La division « Das Reich »

Sur le chemin de la Normandie où se déroule le débarquement, les atrocités dont la division SS se rendit coupable, sous prétexte de représailles par rapport à des actions du maquis entraîne un déchaînement de violence effroyable : meurtres et pillages sans limite, déportations, incendies, d’innombrables crimes seront commis, citons pour mémoire les lâches assassinats de Tulle, Argenton, Oradour ou des environs de Bagnères-de-Bigorre et rappelons que comme souvent les véritables responsables (les haut gradés par exemple) ne seront jamais punis et vivront même, comme le sinistre général SS Lammerding, vieux et prospères, de quoi comprendre la méfiance, voire la haine que ressentiront désormais certains pour l'institution judiciaire.

« C’est avec le double désir d'accumuler des matériaux pour les historiens de demain et informer exactement le lecteur d'aujourd'hui que ce livre a été écrit » et, n’en déplaise aux salisseurs de mémoire, Trafics et crimes sous l’Occupation est un ouvrage indispensable pour comprendre, malgré le malaise constant qu'elle suscite, une période passionnante, surtout décrite par un témoin direct de l'époque (qui a aussi signé une excellente Histoire de la Gestapo dont nous reparlerons). Il est aussi extrêmement bien documenté, la liste des sources est d'ailleurs très précise, quarante ans après on a vite oublié ce genre de soin. Delarue maîtrise aussi parfaitement la langue et rend son sombre récit fluide à lire et en fait de la vraie littérature, autre soin que l'on a balancé aux oubliettes depuis !

491 pages

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