Chroniques concerts
18
Juil
2022
deep purple uriah heep concert reportage

Jamais quatre sans cinq, c'est déjà la fin mais voilà pas l'affiche de malades !

Les belfortins de 58 SHOTS entament la soirée avec un heavy rock zeppelinien tout à fait sympathique, leur gros niveau musical, leur passion manifeste et cette manière tout à fait australienne de faire taper du pied quand c’est le moment ont raison de la chaleur qui les accable. Rien ne semble pouvoir arrêter le rock dans l’enceinte de Guitare en Scène quand bien même il est très difficile en tant que public de résister à la charge solaire (Ged = faux sudiste à la peau d’auvergnat). Le groupe qui connaît déjà les lieux depuis 2018 et a de quoi être fier de figurer sur une affiche pareille est à conseiller à tout fan de hard rock typé Seventies, mais aussi de blues musclé et de classic rock (puisqu’il faut parfois utiliser des expressions de jeune) : les deux guitaristes sont des tricoteurs de première, la section rythmique sait se montrer puissante et subtile à la fois tandis que la voix empreinte d’émotion sait emballer son monde, par exemple quand est annoncé un hommage à un copain disparu en juin, la musique n’adoucit pas les morts, mais sait exprimer de bien jolies condoléances, on attend désormais de pied ferme les 58 SHOTS dans le Sud de la France !

On s'attendait à un gros plaisir avec le concert des britanniques URIAH HEEP ne serait-ce que parce que l’on n’espérait plus les voir un jour sur scène, mais à une tartasse pareille sûrement pas. LE concert de la journée a simplement été un des tout meilleurs de tout le festival, piochant volontiers dans les grands classiques - et pourtant encore bien trop méconnus - de …very 'eavy, …very 'umble, Look at Yourself, Demons and Wizards, Salisbury ou The Magician's Birthday mais aussi du très bon Abominog de 1981, sans oublier pour autant les dernières œuvres publiées (Living the Dream de 2018) et cette rythmique « jeune » (Davey Rimmer à la basse et le très costaud Russell Gilbrook à la batterie) fracasse tout, les « anciens » ont de quoi retrouver une seconde jeunesse, regardez donc Mick Box, soixante-quinze piges, enfiler les riffs et les solos comme autant de perles splendides, ou encore Bernie Shaw multiplier les envolées haut perchées avec un sourire qui en dit long ! Impossible de ne pas mentionner Phil Lanzon jouant au chef d’orchestre derrière son clavier ! Et encore un très bon son et de très belles lumières à mentionner, tout comme un très chouette décor de scène.

Puisqu’on s’est débrouillé pour louper consciencieusement chaque petit set que l’australien William Crighton donnait deux fois par jour sur toute la durée du festival, on a filé, encore sur le nuage Easy Livin’, le voir sur la scène Village où il a quand même fini par atterrir ce dernier soir. Le grand poète hirsute et fuzzy, tout seul avec sa gratte, promène sa voix rauque et énervée sur une setlist très blues rock punky, parfois un peu entre le bûcheron Eddie Vedder qui aurait travaillé sa gorge pour imiter les ours et la mélancolie d’un Jeff Buckley façon garage de plein désert, et sa logique est tout à fait imparable quand il s’agit d’assurer son auto-promotion : « si la musique vous plaît, il y a des vinyles à vendre au stand de merch', sinon, vous pouvez toujours l'offrir à quelqu'un que vous n'aimez pas. » Eh bien cher William, ce serait un cadeau bien trop beau pour l’ennemi, on a vraiment accroché sur cette façon rugueuse et électrique de raconter des histoires, ce côté in-your-face de morceaux bourrés de feeling et d’une horreur viscérale pour les modes du moment, que l’on parle de folk, de blues, de rock, il faut que cela vienne des tripes, aucun doute avec un bonhomme pareil.

Si on a trouvé le fond de scène de URIAH HEEP très réussi, celui de DEEP PURPLE est absolument horrible avec sa contrefaçon de Machine Head dessiné en tremblant sur un morceau de siporex. C’est en tout cas ce que cela nous évoque. Mauvais présage ? En quelque sorte… Car si le groupe assure une fin de set honorable, le début est très, très laborieux pour un Ian Gillan qui ne devrait pas permettre le choix de morceaux qu’il ne peut plus assurer jusqu’au bout, sa façon de disparaître après chaque partie de chant pour laisser ses compère assurer le show est à l’image de la fin de route programmée. Quand on voit la pêche de Roger Glover (à qui est concédé un temps solo plutôt sympa), Ian Paice et Don Airey (qui justifie capillairement l’expression de parties échevelées), on a mal au cœur pour une de nos idoles absolues. La surprise vient de l’absence du guitariste Steve Morse et de son remplacement par l’excellent Simon McBride (ex-SWEET SAVAGE) qui sans faire oublier qui que ce soit démontre un talent indéniable. Peut-être est-il temps - et cela ne date même pas d’aujourd’hui - de penser à une retraite bien méritée pour DEEP PURPLE ? Sad but true…

Point final du festival, Laura Cox et son groupe, death-y-dément abonnés aux bons plans scéniques, déboulent pour une prestation 100% rock comme à leur habitude, forcément motivée par une ère Covid très frustrante pour tout le monde. Au bout de cinq jours, il est temps de dresser un petit bilan du festival, sûrement un des plus intéressants dans un pays très préoccupé à faire des choses tape-à-l’œil les plus médiatisées. Ici, les passionnés sont légion, la sélection extraordinaire pour une jauge humaine et l’équipe vraiment sympa, de la sécu au bureau de presse (ZE rencontre in extremis). On note en vrac un très bel effort au niveau du tri des déchets pour lequel nous sommes de vrais casse-burnes, une propreté des toilettes exemplaire, une sécu présente sans être oppressante, des son et lumière au top. Si on devait évoquer les côtés relous, on dirait que les aliments sont chers par rapport à « chez nous », que le carré d’or pour Jeff Beck 1 a un peu gâché la fête à pas mal de gens et que les essais / démos d’ampli entre les deux scènes étaient parfois gênants pour ceux qui ont encore des oreilles qui fonctionnent bien. Euh, sinon, deux spécialités à évoquer pour conclure : une à conseiller au reste de la France : ici les gens disent BONJOUR, une autre troublante pour l’œil humain : le croisement loufoque entre la ballerine et la Croc (que nous baptisâmes la Croqueline, le premier choc passé).

Merci éternel à Géraldine et Thierry, à l’année prochaine ! On the road again !

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