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Genre : réhabilitation, un geste utile
Scénar : une bande de bouillants jeunes hommes assistent à un enterrement à la fasciste mais comme ce n’est pas assez pour eux de côtoyer la vieille garde - de loin, bien sûr - ils vont ensuite bousiller les motos de militants communistes sous les yeux d'une police visiblement complice. Point de chute habituel, Franco et les autres retournent sur la place San Babila, point de rencontre de tout ce que Milan compte de néofascistes. Là, les magasins juifs sont souillés de croix gammées et les passants qui veulent intervenir bombardés à la bille de plomb grâce à des frondes bien tendues et maniées par des pros de la castagne… Sur leur chemin, la clique ramasse une fille : l’un d’eux la viole, un autre la brutalise mais elle décide de rester avec eux quand même, faut dire qu’elle n’est pas du genre à voir plus loin que le bout de très hauts talons. Lors d'une manif’ « rouge », un participant se retrouve seul, les jeunes le tabassent mais il réussit à filer. Du coup, ils décident de taper plus fort et de poser une bombe mais le coup foire à cause du lâche désigné pour exécuter la mission, il va désormais tenter de se racheter par tous les moyens…
Pour la première fois sous une forme visuellement splendide et inspiré par des faits réels qui se sont produits à Milan en 1975, San Babila : Un crime inutile est un excellent film de Carlo Lizzani, cinéaste méconnu du grand public mais très engagé à gauche et nanti de l’œil expert du documentariste (il a même tourné avec La Muraglia cinese en 1958 le premier doc en Chine populaire !), il signera de très bons films souvent inspirés par les évènements de la seconde guerre mondiale (Achtung! Banditi!, Traqués par la Gestapo, Le Procès de Verone, Les Derniers jours de Mussolini, etc.) mais aussi d’autres choses plus classiques dont le très bon western Requiescant ou le polar Bandits à Milan. Pour revenir à l’aspect militant du bonhomme, il fallait oser aller tourner sur les lieux mêmes en dépit des regards mauvais, l’hallucinante scène du défilé au pas de l'oie (musique incluse) témoigne franchement d'un sacré courage pendant les années de plomb où les coups pleuvaient dès l’apparition d’adversaires déclarés.
Une fois de plus, le travail d’Ennio Morricone est reconnaissable de loin, cette chouette bande originale avec sifflet de flics reste dans les têtes un bon moment, sans parler des images, terriblement bien filmées, et d’un casting de petite notoriété - ou presque - qui est vraiment à la hauteur du projet liant avec bonheur violence, suspense, politique et malaise. Dans la série des détails croustillants, les apprentis terroristes les moins discrets du monde, rappelant bien évidemment les excès de ceux d’Orange mécanique par exemple avec la scène des godemichés mais pas seulement, roulent en Méhari (le plastique, c’est fantastique) et sont affublés avec le personnage ridicule de Lalla d’une véritable cagole caricaturale, mais pas vraiment crédible, à moins que nous ne soyons toujours aussi naïf. Découpé de façon temporelle sur une journée, San Babila : Un crime inutile est un crescendocumentaire terrible, au discours conscient : il n’y a pas grand monde à sauver là-dedans quand la corruption est partout, de la police aux fiers fascistes, et que les extrêmes ne trouvent d’autre solution que d’emporter le reste du peuple avec eux dans le gouffre de la violence.
Bonus : bandes-annonces, interview de Carlo Lizzani (5’, 2010, l’homme s’est pour info donné la Mort en 2013 à 91 ans…), entretien avec Gilberto Squizzato, assistant réalisateur et acteur (65’)
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