Chroniques Blu-Ray
06
Avr
1999

Les étoiles évaluent le plaisir ressenti à la découverte des œuvres, rien à voir avec une quelconque note !

harald reinl edgar poe gothique bluray

Genre : horreur germanique, autant dire du rare et précieux restauré dans un médiabook mortel !

Scénar : au tout début du XIXème siècle, le comte Regula, qui pour une mystérieuse raison avait torturé à mort douze jeunes vierges, juge et bourreau se présentent dans sa cellule pour livrer la sentence qui lui sera infligee : devant l'horreur de ses crimes il sera écartelé avant d'être décapité. Le condamné jure de se venger de son juge et de ne pas épargner sa famille. En attendant, il se voit appliquer sur le visage un masque garni de pointes. Trente-cinq ans plus tard, Roger Mont-Elise, un homme à la recherche de ses origines, est invité au château d’Andomai dans le Mittelland par un certain Frederic Regula. Quand il arrive dans la région, personne ne veut parler de ce fameux château, « que Dieu vous protège » dit l’une, « Vous courez à votre perte » dit l'autre, mais voilà que soudain un ecclésiastique porté sur la bouteille lui propose de l'emmener jusqu'au « château sanglant ». Il croise aussi sur sa route la belle Lilian von Brabant, également invitée au château… L’itinéraire s’avère plein d'embûches : l’auberge où devait s'arrêter le curé a été incendiée, une horde de bandits rôde et la forêt ne montre rien de rassurant. Et encore, ils n’ont pas rencontré le verdâtre Anatol, brrrr…!

Quand la série de westerns Winnetou s’essouffle jusqu’à faire un bide, Harald Reinl convainc les producteurs de tourner un film d’un genre très peu représenté en Allemagne malgré son statut de pionnière en regard de la filmographie fantastique du début du siècle (Le Golem, Le Cabinet du docteur Caligari, Les Trois Lumières, Nosferatu le vampire, Faust, une légende allemande et plein d’autres !). Le projet accepté, un certain nombre d’acteurs des adaptations de Karl May montent dans le train, au premier rang desquels trônent Karin Dor (pour rappel, l’épouse du réalisateur dont elle se séparera après le tournage et quatorze ans de vie commune) et l’acteur américain Lex Barker. Atteignant quasiment le double mètre, on ne pouvait que lui opposer un type à sa taille, et qui mieux que Christopher Lee pouvait tenir tête à ce héros romantique bien que parfois un peu transparent (tiens, on note au passage que Barker a le même tic que John Wayne : il bouge les oreilles en écarquillant les yeux !). La très mignonne Christiane Rücker, l’effrayant Carl Lange (un mort-vivant au sang vert, yeah !), le fragile Dieter Eppler et le truculent Vladimir Medar (frère Tuck, es-tu là ?!) complètent ce très beau casting.

Après la résurrection de Siegfried (aussi dispo chez Artus 1), ce sont les vampires qui sont convoqués par Harald Reinl, enfin du moins s’il on en croit ce titre un peu crétin puisque le scénario est en fait - très vaguement - inspiré de la nouvelle Le Puits et le pendule d’Edgar Allan Poe. Le film est à rapprocher de tous les classiques du genre depuis la fin des années 50 et l'explosion des films de la Hammer, des forfaits de l'italien Mario Bava mais aussi de Giorgio Ferroni pour son splendide Moulin des supplices. Même si on n'aura de cesse de rappeler que le réalisateur est natif d'Autriche, les caractéristiques « allemandes » sautent aux yeux, particulièrement grâce aux superbes caractères gothiques du générique, aux décors et paysages auxquels nous referons allusion en parlant des bonus. N'empêche que pour le reste, le trousseau est complet : procession lugubre, cimetière au portail grinçant, brouillard, ruines, arbres morts ou garnis façon macabre, objets religieux mystérieux, crypte, portes et herses menaçantes qui se ferment seules, armures, torches, rats, serpents, salamandres, araignées, scorpions, tout est là (et même, n'importe quoi, une bande de vautours qui traînent dans les couloirs !), anche la dose sadique all'italiana !

C’est vrai qu’au fond il ne se passe pas grand-chose mais l'ensemble est tellement bien fait (les effets spéciaux sont souvent vachement bien fichus pour l'époque) qu'on se laisse prendre au jeu de suspense auquel on ne croit pas vraiment. Un beau film en costumes aux jolies couleurs et aux très beaux décors (le gothique romantique n’est jamais très difficile à trouver en Allemagne et pour le reste, Gabriel Pellon a assuré un maximum !) qu’il faut heavy-demment visionner en version allemande sous-titrée. Difficile de ne pas penser, pour différentes raisons liées au folklore, à l'ambiance ou à des détails de mise en scène, au Masque du démon, au Dracula de la Hammer, aux films Poe de Roger Corman mais aussi au Sang du vampire qui aborde le sujet « vampirique » de manière assez similaire. Le Vampire et le Sang des vierges se distingue lui par une chevauchée capée de noir qui n'est pas sans rappeler la Mesnie Hellequin quand elle s'attaque à la diligence de la jeune fille mais aussi par des peintures et des sculptures qui rappellent immanquablement l’art de Hieronymus Bosch, à commencer par cette statue à tronche à la fois animale et monstrueuse que l’on croirait sortie des évocation de l’Enfer par le maître flamand.

Bonus : présentation par Christian Lucas et Stéphane Derderian (39’), Sur les lieux du tournage, deux très chouettes versions Super 8 (16’ et 17’), diaporama, bande-annonce originale et le livret de Christophe Bier qui retrace la carrière du réalisateur docteur en droit mais surtout héritier d'une culture alpiniste qui le conduira à travailler avec Leni Riefenstahl. Alors que celle-ci finira par travailler étroitement avec le IIIème Reich en tant que réalisatrice après des débuts en tant qu'actrice, Reinl ne la suivra pas sur cette piste on ne peut plus noire (même si des sources attestent la relative sympathie du réalisateur pour le régime) mais la vie le remettra sur le chemin du cinéma. Réalisateur d'un court-métrage remarqué au festival de Venise puis d’une série de films alternant terroir forcément enneigé et comédies dramatiques ou sentimentales, c’est avec ses Krimi dans lesquels il fait apparaître sa jeune épouse Karin Dor qu’une certaine consécration arrive, merci éternel à Edgar Wallace, à Fritz Lang pour son Mabuse, mais aussi aux Indiens d'Amérique fantasmés par Karl May dont il inaugure la série triomphale, puis rebelote Fritz Lang et des Nibelungen avant d’arriver à notre fameux Vampire où il atteint sûrement le sommet de sa carrière. La suite de moins en moins sympathique de l'œuvre sera là pour le confirmer. Schade

1 voir La Vengeance de Siegfried (Die Nibelungen) de Harald Reinl (avec Uwe Beyer, Rolf Henniger, Siegfried Wischnewski, Maria Marlow, Hans von Borsody, Terence Hill, Fred Williams, Karin Dor, Herbert Lom…) 1966-1967 Réédition 2021 et afin de lire plein d’autres chroniques à l’occasion, clique juste sur les noms en rouge.

Info / commande : https://www.artusfilms.com/les-chefs-d-oeuvre-du-gothique/le-vampire-et-le-sang-des-vierges-367.

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