Chroniques CD
21
Nov
2015

Les étoiles évaluent le plaisir ressenti à la découverte des œuvres, rien à voir avec une quelconque note !

[Publié à l’origine dans Banzaï Horreur]

Il s’était produit un souffle quasi-imperceptible que seuls les sculpteurs de peau peuvent attendre et entendre. Cette sorte d'étrange frémissement-affaissement avait eu lieu quand il avait percé la peau du ventre... D'une main de maître il avait ensuite saisi le visqueux tuyau des intestins pour le dévider très lentement hors de son enveloppe. Les sonorités infâmes, gargouillis mouillés de la viande que l'on tripote frénétiquement, auraient fait vomir n'importe qui sur la planète mais lui y trouvait un plaisir incomparable, même si les gaz de fermentation s'échappaient avec une odeur écœurante. Mais il ne portait ni masque ni lunettes, refusant de louper un détail de cette fastidieuse opération.

La jouissance résidait dans le fait qu'il avait été suffisamment efficace pour mener à bien l'éjection d'un maximum de tripes avant le réveil hurlant de sa victime qui eut un pire regard encore quand il lâcha dans la pièce par une sorte de chatière l'énorme chien affamé qu'il gardait captif depuis des semaines, n'épargnant pas les coups de bâton pour le rendre encore plus dingue qu'il ne l'était déjà. Petit, il adorait tabasser les bêtes et était rapidement devenu un expert dans cet art mais il avait compris très tôt que c'est l'homme, qui possède un éventail bien plus large des sensations de la souffrance, qu'il voulait désormais torturer jusqu'à plus soif. Après tout, y avait-il plus drôle sur cette foutue planète que les cris d'un humain à qui on écrase soigneusement les orteils à coups de masse de bon matin ?

Il comptait bien un jour réunir dans un recueil richement illustré de ses propres photographies les différentes sessions qu'il avait menées depuis des années, juste pour le plaisir de dégoûter les âmes gentilles - et hypocrites croyait-il dur comme fer en les voyant ralentir sur un lieu d’accident - et surtout pour posséder dans sa bibliothèque infernale, au milieu des manuels de torture de la CIA, de la Gestapo ou du NKVD, un livre signé de sa main. Relié cuir bien sûr, de préférence humain, cela va de soi.

Forer un nombril à la perceuse, arracher à la pince un ongle, un testicule, un sein ou une joue n'était pas à la portée du premier quidam qui passe, sa formation, inspirée des films des Michael Armstrong et Reeves, du Puits et du pendule, de la collection Gore et de quelques autres joyeusetés antiques, avaient réclamé de nombreux sacrifices. Quand les abrutis de son quartier volaient pour se procurer jeux et consoles et s'abrutir devant un écran à la grande satisfaction des autorités qui ne demandent toujours que ça, lui multipliait les visites chez les médecins chez qui il dérobait son premier matériel qu'il essayait d’abord sur lui, son corps n'était d’ailleurs plus qu'un long catalogue de coupures, brûlures et taillades de scalpel qu'il n'exposait qu'aux femmes à qui il réglait ensuite le compte sur l'heure.

Leurs restes nourrissaient ensuite les crevettes qui résidaient dans une cave-canal où la rivière circulait, le passé de moulin de la maison familiale était on ne peut plus utile à son activité. En parlant de famille, elle fut la première à tester le dispositif : le crâne de Papa qui avait trompé Maman s'était vu défoncé au marteau et celle-ci, enivrée, n'avait fait qu'applaudir le geste du fils. La semaine suivante, après avoir vérifié que les crevettes avaient bien fait leur boulot de nettoyage d'os qu'on n'avait plus qu'à mêler au feu de la cheminée, c'est Maman qui avait ramassé un coup de barre de fer sur la tête et ce coup avait suffi pour l'envoyer ad patres puis au paradis de la pince.

L'explication que le couple avait gagné une croisière puis s'était installé sous les tropiques avait semblé suffire au voisinage. Il avait ensuite écumé les chemins et fait monter dans sa voiture tout ce que la rue comportait de déséquilibrés que personne ne remarquait jamais, et commença ces petites expériences scientifiques sur la douleur et la solidité des chairs. Rien ne pouvait l'énerver plus que les oisifs ; quand on a un peu d'imagination, on trouve toujours quelque chose à faire de sa vie bordel !

P. S. : chronique conventionnelle ici : GRAND DÉTOUR [Fra] Tripalium (Désertion Recs / Dreamingorilla Recs / Drown within Recs / Rude Recs - 2015).

https://granddetour.bandcamp.com/album/tripalium

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