Hell’s Angels de Howard Hughes (avec Ben Lyon, James Hall, Jean Harlow, John Darrow, Lucien Prival, Frank Clarke, Roy Wilson…) 1930

Genre : l'Enfer, c'est la Terre

Scénar : en Allemagne à la veille de la première guerre mondiale, le temps était à la fête, les brasseries ne désemplissaient pas, tout comme les chopes dans lesquelles la bière locale coulait à flot. Un peu trop puisqu’un des trois jeunes hommes (un allemand et deux anglais), se retrouvant souvent là est surpris en la compagnie d'une femme d'officier par l'officier lui-même qui le provoque en duel. Un duel qui préfigure la guerre qui est soudain déclarée. L’ami allemand doit rentrer chez lui et les deux frères entrer dans l'armée britannique, les deux se retrouvent ainsi dans l'aviation. L’ensorceleuse Helen, compagne du premier charme le deuxième frère, comme si la guerre ne suffisait pas pour séparer les hommes ! Pendant que leur camarade allemand sabote un bombardement à bord d'un zeppelin, les deux frères sont envoyés lâcher une cargaison mortelle sur un grand dépôt de munitions…à bord d’un avion capturé à l’ennemi. Jeux dangereux quand en guerre personne ne peut se permettre de fermer les yeux sur la trahison…

Malgré les pacifistes anarchistes qui se demandent publiquement pourquoi ils devraient se faire tuer pour un pays pour lequel ils ne ressentent ni amour ni devoir, on emploie tous les moyens pour que les jeunes gens s'engagent. Qu'est-ce que ne feraient pas faire le patriotisme aveugle et le fanatisme politique…mais aussi les jolies femmes ! L’aviateur-réalisateur Howard Hughes dispose de sacrés moyens et l’ensemble se révèle plutôt bien fait pour l'époque (il y a presque cent ans, tout de même !), les prises de vue aériennes sont bluffantes, on a droit à de sacrées explosions aussi, le grand spectacle est au programme d’un grand et beau film présentant une message visuel marquant (les carnages des bombardements à venir dans le prochain conflit mondial sont déjà là, la scène des suicides en dit long sur l’absurdité des ordres d’une hiérarchie sans pitié pour la chair à canon), et les cascades assez dingues font un peu oublier le jeu parfois hésitant de certains des acteurs. On ne pouvait pas tout avoir d’un coup !

Résolument moderne, l’œuvre d’Howard Hughes (avec une aide à la mise en scène de James Whale, futur réalisateur de Frankenstein et les autres) figure déjà une femme prétendant déjouer les pièges de la société en ne souhaitant pas fonder de famille mais au contraire rester libre et profiter de la vie jusqu'au bout, un personnage qui a dû faire scandale en son temps en même temps qu’un film qui pointait du doigt les horreurs mais aussi les hontes de la guerre. Hell’s Angels a pour finir quelques particularités : réalisé comme un film muet, il est retravaillé en film parlant avec des scènes en couleur, les textes en anglais sont régulièrement entrecoupés par de l’allemand et du français. Hell’s Angels sera aussi un film tourné sous le signe de la tragédie puisqu’il a provoqué quatre morts dont trois pilotes (mais rien ne pouvait arrêter le réalisateur qui a lui-même effectué quelques cascades en avion qui lui ont coûté un certain nombre d’os brisés), rien n’était assez cher pour Howard Hughes qui ne fit pourtant pas un triomphe à la sortie.